The ghost cars
Exposition au Musée des Transports de Dresde, Allemagne.
7.11.2017_4.03.2018 => prolonger jusqu'au 6 Mai 2018.
Trema Förlag, maison d'édition suédoise dédiée à la photographie, a publié le livre The ghost cars.
200 x 260 mm
Couverture rigide
80 pages
40 photographies
Texte de Hélène Chédorge (en anglais)
1ère édition: 400 exemplaires
Publié en décembre 2016
ISBN 978-91-88539-00-7
Une édition limitée à 30 exemplaires est aussi disponible ICI.
Lire l'interview sur L'INTERVALLE pour obtenir des clés de compréhension concernant cette série.
Lorsque j’ai rencontré Frédérick Carnet, il terminait un travail sur les pèlerins du Camino Francès. Il m’a raconté ses voyages à pied et à vélo au Japon, en Islande et sur ce chemin de Compostelle où il s’engageait physiquement totalement comme s’il voulait éprouver jusque dans ses chairs la traversée des paysages et l’âpreté des conditions climatiques. Pour autant, le travail photographique tiré de ses odyssées ne laisse pas transparaître les conditions physiques de son choix de locomotion.
Avant notre première rencontre, sur son site internet, c’est la série Ghost Cars qui avait retenu, en premier lieu, mon attention. Gérant un musée automobile, j’ai souvent regretté que la photographie de voiture soit trop souvent réduite à l’aspect commercial et à ses chromes rutilants, ne traitant pas assez des relations complexes et néanmoins universelles qu’entretient notre société contemporaine avec cet objet si éminemment quotidien.
A la première vision de la série, ces sont des vers d’Aragon dédiés à Fernand Léger* qui m’ont semblés être photographiquement mis en scène :
« Ce monde est un immense camouflage où la couleur et l’ombre Cachent l’homme et le découvrent tour à tour ».
Pour mieux nous révéler l’importance attribuée par nos contemporains à la voiture, Frédérick a choisi de nous la montrer masquée et de la surprendre dans son sommeil, souvent à l’ombre des domiciles de ses propriétaires.
Sous sa housse de protection, on la devine plus ou moins luxueuse, laissant entrevoir une jante ou se laissant épouser par leur linceul après la pluie, pour mieux avouer une silhouette sportive. Le camouflage devient un révélateur de ce que l’automobiliste du Japon, de Londres, d’Athènes ou de Bamako souhaite qu’elle incarne métalliquement. Les photographies de Frédérick sont autant de fenêtres pour imaginer la relation voire l’intimité de l’homme et de sa machine car aucun des protagonistes n’est démasqué !
Comme le disait Aragon dans le même poème :
« Le camouflage croyez m’en ça c’est du grand art dans la vie ».
Difficile de comprendre, au premier abord, ce qui relie notre photographe, épris de nature à cette mécanique, lui qui privilégie la force du mollet pour voyager.
J’ai ma théorie à ce sujet. Je le soupçonne, sans qu’il ne se l’avoue, de questionner une caractéristique de son territoire d’attache : la Sarthe. En effet, je l’ai connu habitant à proximité d’une autoroute qui, une fois l’an, en juin , déverse des dizaine de milliers d’automobilistes venus du nord de l’Europe et souvent d’Angleterre pour assister, une vingtaine de kilomètres plus loin, aux 24H du Mans (une forme de pèlerinage ?). N’oublions pas que c’est après son expédition sur le Camino Francès qu’il a réalisé qu’un des chemins de Compostelle passait devant chez lui, dans la Sarthe...
Cette série est pour moi l’une des plus intéressantes car probablement la plus poétique (et parfois ironique aussi) sur la relation de l’homme et de la voiture, quel que soit le point du globe où ont été
surprises les belles endormies. Laissons Aragon conclure sur ce camouflage poétique qui va comme un gant à l’art de Frédérick Carnet :
« Et pour ce genre-là de conversation mon ami Guillaume Apollinaire Eh bien il en connait un bout
Il a même inventé quelque chose qui ressemble à du camouflage parlé Il appelle cela des calligrammes et c’est vrai que c’est joli à voir ».
Hélène Chédorge
*Il s’agit d’un poème écrit par Aragon sur la vie et l’œuvre de son ami, le peintre Fernand Léger qui était aussi un homme de l’Ouest, né à Argentan (soit à moins de 100 km du port d’attache sarthois de Frédérick Carnet). Il a été publié dans une monographie des textes et lithographies de Fernand Léger sur les voyages de ce dernier en Europe et aux Etats-Unis en 1960 (« mes voyages » paru chez les Editeurs Français Réunis).
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